La Galerie Nathalie Obadia est heureuse de présenter Pour excaver la lumière, la première exposition personnelle de l'artiste Quentin Gouevic à Paris.
Né en 1996 à Saint-Brieuc, Quentin Gouevic semble être de ceux qui tendent à explorer, à travers leurs peintures, un langage des sentiments. Les tableaux exposés ne représentent pas, ne disent pas non plus, s'incarnant telles "des peintures de sensations, concrètes et perceptibles par les sens" déclare l'artiste. Un ensemble inédit de trois peintures résolument abstraites se déploient dans l'espace d'exposition, se situant dans la continuité d'une réflexion sur le renouvellement du médium de la peinture, de la trace, du geste et de la couleur dans le champ pictural.
Pourtant, lorsque Quentin Gouevic entre aux Beaux-Arts de Nantes en 2019, il avait l'intention d'explorer l'imagerie figurative. Au fil de ses expérimentations - et poursuivant aujourd'hui ses recherches aux Beaux-Arts de Paris - l'artiste s'aperçoit que son désir ne se situe pas dans la représentation ; il s'agit d'un désir de peinture. Avec un dynamisme qui ne faiblit pas, Quentin Gouevic s'attache désormais à exploiter toutes les possibilités du champ pictural : "la qualité de la touche, celle des matières, l'équilibre et la beauté des formes, la pertinence des traces, la force et la prégnance des couleurs, la profondeur des transparences, la justesse des tons et par-dessus tout, la stature globale de la peinture." déclare-t-il.
De ce désir naît une peinture de gestes et de couleurs, vigoureusement brossée en de larges coups de pinceaux, épaisse par les multiples jeux de superpositions, de recouvrements, de transparences, et restant attachée, toujours, au monde sensible de l'artiste. Avec une extrême spontanéité, Quentin Gouevic expérimente ce qu'il nomme "les écarts de la peinture". Il accueille le hasard, les accidents parfois heureux qu'il module et travaille, restant alerte aux "suggestions muettes et aux pistes masquées" précise-t-il. L'artiste repousse les limites, déplace le regard pour le renouveler sans cesse, allant jusqu'à retourner ses tableaux afin de renverser le lieu de la gravité. Des coulures ascendantes et descendantes se déploient ainsi au cœur de la surface peinte, déstabilisant celles et ceux qui la regardent.
L'engagement physique de l'artiste dans l'acte de peindre - parfois jusqu'à l'épuisement - provient certainement de sa condition ouvrière passée. Quentin Gouevic travaille à l'usine et à l'abattoir pendant trois ans avant d'intégrer les Beaux-Arts de Nantes. Aujourd'hui, l'artiste entretient une relation étroite avec ses oeuvres : dans un corps à corps entre le peintre et son tableau, des jeux de circulations et des rapports de forces s'opèrent. Une dimension politique qu'il est important de souligner, l'artiste déclarant : "mon patrimoine, le seul auquel je tiens vraiment, c'est ma force de travail. Alors ma peinture à moi, elle tient dans mes mains. Et chaque jour, mes mains, je les envoie s'abreuver en liquide synoviale aux sources de mon substratum. Pour que lorsqu'elles remontent à la surface, elles m'aident à trouver des réponses". Un message qui donne un sens palpable à la formule de Pierre Soulages qui disait "c'est ce que je fais qui m'apprend ce que je cherche"¹.
Au-delà des enjeux picturaux auxquels il se dévoue quotidiennement, la peinture représente pour Quentin Gouevic une ouverture, une façon de s'incarner au monde. En cherchant, recouvrant, renonçant, construisant et découvrant sans cesse, l'artiste s'engage de tout son être, animé par un désir profond d'aller plus loin dans le champ pictural. La couleur jaillit de ces œuvres aux formats variés, Quentin Gouevic cherchant à excaver la lumière, d'où qu'elle vienne.
¹Alfred Pacquement, Préface de l'ouvrage de Roger Vailland, comment travaille Pierre Soulages, Le Temps des Cerises, 2012, p.11